Les origines du
plaqué d'argent, de l'utilisation de l'iode, et de toutes les
méthodes employées par Niépce et
Daguerre.
Conseils
donnés à Niépce alors qu'il n'était pas
encore question d'association.
par Jacques
Roquencourt.
Sommaire: Nous démontrons que Daguerre a
conseillé à Niépce l'utilisation des vapeurs,
contrairement aux affirmations de certains auteurs
niépçophiles, et que ces mêmes conseils sont
à la base de tous les procédés employés
par les deux inventeurs. Il a de même conseillé
l'utilisation du plaqué d'argent, ce que nous
démontrerons dans la suite de cette étude. A notre avis,
Niépce était déjà redevable envers
Daguerre, avant la signature du contrat.
Lettre de Nicéphore
à Isidore au sujet des conseils de Daguerre, les 2 et 4
septembre 1827.
"quand au mode d'application
à la gravure sur métal, il est loin de la
déprécier; mais comme il serait indispensable de
retoucher et de creuser avec le burin, il croit que cette application
ne réussirait que très imparfaitement pour les points
de vue, ce qui lui semble bien
préférable pour ce genre de gravure, c'est le verre en employant l'acide fluorique, il
est persuadé que l'encre d'impression appliquée avec
soin à la surface corrodée par l'acide, produirait sur
un papier blanc, l'effet d'une bonne épreuve, et aurait de
plus, quelques chose d'original qui plairait
d'avantage.&&&"
Méthode avec l'acide
fluorique.
Traité de CHIMIE ÉLÉMENTAIRE.
Par L J THENARD. 2èmeédition
1817, pages 631 et 632, 3ème édition 1821, pages 721 et
722.
"ou on les expose à la vapeur de cet acide en
mettant une partie de fluate de chaux et 2 parties d'acide
sulfurique dans une boite de plomb, que l'on
chauffe légèrement et que l'on recouvre avec la
pièce à graver. Dans les deux cas, et surtout
dans le dernier, l'acide ne tarde point à attaquer et
dépolir le verre. Alors on enlève le mastic, et on
achève les traits du dessin par les moyens ordinaires. Cette
manière d'opérer offre deux grands avantages, une
exécution plus prompte et plus parfaite. &&&"
En conseillant cette
méthode, Daguerre pensait que la matière
photo-sensible, utilisée par Niépce, était
perméable aux vapeurs de l'acide fluorique1.(lire ce
renvoi)
Niépce le 8
décembre 1827 à Kew, au sujet de ce conseil.
"il suffirait, après avoir
opéré, de noircir légèrement la partie
gravée, et de la placer sur un papier blanc, pour obtenir une
épreuve vigoureuse.
M. Daguerre, peintre du Diorama
à Paris, m'a conseillé de ne pas négliger ce
mode d'application qui n'aurait pas, il est vrai, l'avantage de
multiplier les produits;
mais qu'il regarde comme
éminemment propre à rendre toutes les finesses de la
nature" (souligné dans le
texte).
Le résultat conseillé par Daguerre
à Niépce en 1827.
Daguerre à Niépce le 15 novembre
1829.
"aussitôt qu'il sera indispensable d'y mettre le
talent d'un graveur, la découverte perdra tout son
intérêt. La nature a ses naïvetés, qu'il
faut bien se garder de détruire."(souligné dans la
lettre).
A la suite des conseils
de Daguerre, Niépce écrira:
"La découverte que j'ai faite
et que je désigne sous le nom d'Héliogaphie, consiste
à reproduire spontanément, par l'action de la
lumière,
avec les dégradations du noir au blanc, les images reçue dans la chambre
obscure."
Nos essais avec cette méthode, sur verre.
(janvier 1993)
à gauche un essai avec le bitume de
judée, à droite gravé comme l'indique la
méthode donnée par Thénard.
remarques: Ce que nous avons observé, et
ce que Niépce a aussi constaté:
1°- lorsqu'on chauffe très
légèrement comme il est indiqué dans la
procédure, le bitume de Judée se
liquéfie en présence des vapeurs
légèrement chaudes.
2°- que ce bitume de Judée
est imperméable aux vapeurs de l'acide fluorique.
3°- et comme l'indique Daguerre
à Arago, la variation en épaisseur de la couche de
bitume en fonction de l'insolation.
C'est pour ces différentes raisons que
Nicéphore précisera dans sa notice:
"la substance que j'emploie maintenant, avec le plus de
succès est l'iode qui a la propriété de se vaporiser
à la température de
l'air, pour noircir la planche par ce
procédé."
Niépce a donc été amené,
pour obtenir le résultat conseillé par Daguerre, de
remplacer les vapeurs de l'acide fluorique par d'autres vapeurs et le
verre par le plaqué d'argent.
Ses recherches l'amèneront à utiliser les vapeurs
d'iode; celles-ci ayant une action plus ou moins efficace sur
le plaqué d'argent en fonction de l'épaisseur du bitume
insolé, produisant ainsi les gradations de teintes.
"et j'ai l'espoir fondé de
donner aux représentations des objets sur argent
plaqué, toutes les gradations de teinte du noir au blanc,
chose importante qui m'avait été bien recommandé
par Mr Daguerre..." Niépce à de Curley 28 nov
1828.
Héliographie par contact d'un transparent
d'une vue prise sur papier.
essai sur plaqué d'argent avec les vapeurs
d'iode pour noicir à l'air.
(août 1994; avec la composition indiquée
dans la notice.)
Conclusion.
Contrairement aux affirmations de
tous les historiens2, c'est
Daguerre qui a conseillé à
Niépce l'utilisation des vapeurs.
La méthodologie
employée, sera identique dans tous les procédés
ultérieurs utilisés par la suite par
Daguerre:
-Vapeurs d'éther
sulfurique.
-Vapeurs de pétrole pour
le résidu d'essence de lavande: consulter le "Physiotype"
-Vapeurs de mercure pour l'iodure
d'argent.
-Voir aussi
et surtout le commentaire suivant de Daguerre, page 50 de sa notice: "Les dissolvants par
évaporation ou par l'effet du calorique sont bien
préférables.....Cette manière de procéder
donne une gradation de teintes qu'il est tout-à-fait
impossible d'obtenir en trempant l'épreuve dans un
dissolvant."
Ceci nous a été confirmé début mars 2002
à la lecture, de la correspondance de Niépce à
son cousin de Curley, ainsi que du catalogue de la vente de la
collection d'André Jammes.
Le 28 novembre 1828 " et j'ai
l'espoir fondé de donner aux représentations des objets
sur plaqué d'argent, toutes les dégradations de teinte
du noir au blanc, chose importante qui m'avait été bien
recommandé par M. Daguerre &&&"
Le conseil du
plaqué d'argent.
Lemaitre n'a pas conseillé le plaqué
d'argent à Niépce, l'étude des lettres connues
et nos expériences nous l'ont confirmés.
(que le lecteur lise attentivement la lettre de
Lemaitre datée du 12 octobre 1829 et compare avec sa
réclamation, ainsi que la réponse de Niépce
à cette même lettre )
Daguerre a bien conseillé le
plaqué d'argent,
ainsi que de brunir ce plaqué
"pour avoir une opposition entre les blancs et le noir plus
tranchée "Niépce 8 déc 1827".
Lorsque Niépce proposera
un contrat à Daguerre pour l'aider à améliorer
son
procédé , ce dernier
répondra le 27 novembre 1829.
"Je croyais
seulement vous donner quelques conseils ce que je ferai toujours avec
bien du plaisir dans le cas où ma proposition ne vous
conviendrait pas"
L'utilisation de l'iode
conseillée par son cousin de Dijon.
L'iode pour noircir à
l'air.( voir ci dessus: En
fait...)
Dans sa notice sur
l'héliographie, Niépce n'indiquera pas que le
plaqué d'argent, soumis aux vapeurs d'iode (iodure d'argent),
était sensible à la lumière; la couche
photosensible
étant le bitume
de Judée.
La confirmation est
apportée par la remarque de Daguerre: " les noirs sont
verdâtre".
Suite à la proposition de
Daguerre d'employer l'iodure d'argent comme couche photo-sensible
:
"Aussi, après quelques autres tentatives, en
suis-je resté là, regrettant bien vivement, je l'avoue,
d'avoir fait fausse route pendant si
longtemps, et, qui pis est, si
inutilement &&"
"Mais, je le
répète, Monsieur, je ne vois pas que l'on puisse se flatter de tirer parti de ce
procédé, pas plus de tous ceux qui tiennent à l'emploi des oxides
métalliques...."
Nicéphore Niépce à Louis Daguerre:
lettres datées du 8 novembre 1831 et du 3 mars 1832.
1-lettre
adressée à Arago par Daguerre et publiée le 30
septembre 1839 dans les CRAS.
2-Voir les
commentaires de Potonniée repris par Paul Jay. Annexe XXIX,
pages 305 et 306 de sa "Genèse d'une Invention".
référence: L'invention de la photographie: une
tragédie (à paraître)
lorsque l'iodure est
exposé à l'air l'image est verdâtre, il faut
exposer au soleil pour obtenir des noirs.
Suite à ce
constat fait par Daguerre, ce dernier dirigera les recherches sur
l'obtention des blancs.
Héliographie sur verre
avec le bitume de Judée.
L'initiative de proposer un produit (principe)
photo-sensible blanc:
Dans la notice sur l'héliographie, Daguerre
indique en bas de page cette précision importante et
évidente:
"La teinte la plus claire
que donne ce procédé n'est pas
blanche." (sur le plaqué d'argent)
Le 26 février 1830, donc au tout début de
l'association, Daguerre écrit:
"Le bitume de Judée me paraît, ainsi
qu'à vous, avoir les propriétés
nécessaires à l'exception
cependant du blanc...... Il nous
faut chercher le blanc et son
opposé. L'iode ne me paraît pas convenable, il
est toujours irisé ou verdâtre."
Dans cette même lettre, Daguerre ajoute au code convenu pour la
correspondance:
52: blanc.
De ce constat fait par
Daguerre, les recherches auront pour but de satisfaire à ces
exigences.
Les épreuves
réalisées sur verre seront posées sur un papier
noir pour faire ressortir le dessin comme pour la table
servie.
"Utilisant les
techniques apprises auprès de Niépce, il inventera un
troisième procédé, le daguerréotype,
premier
procédé
photographique praticable du fait d'un temps de pose abaissé
à environ quinze minutes.
Ce dernier
procédé est bien entendu redevable à
Niépce car bon nombre d'aspects découlent de
l'héliographie. (J L
Marignier)"
Rien n'est plus
contraire à la vérité et de la part de J L
Marignier pas un mot sur les excellents conseils de Daguerre.
(Jacques Roquencourt)
Étude faite entre 1991 et
1994 et confirmation le 15 mars 2002.